La Servante est inspirée d’un fait divers. Dong-sik enseigne le piano à des ouvrières d’une grande usine de textile. Jeune et séduisant, il fait chavirer le cœur de ses élèves et c’est ainsi qu’il provoque le renvoi d’une des ouvrières qui a eu l’audace de lui avouer son amour. Dong-sik, pris de remords, décide alors d’embaucher comme servante une autre de ces ouvrières à la demande d’une autre camarade à qui il donne des leçons particulières. La femme de Dong-sik attend un troisième enfant et ils viennent d’emménager dans une nouvelle maison encore en travaux, aussi une aide extérieure est la bienvenue. Mais la jeune fille se révèle étrange et insaisissable. Elle espionne les faits et gestes de Dong-sik, commence à jalouser son amie qu’elle trouve bien entreprenante et devient menaçante avec les enfants et l’épouse de son employeur…
Kim Ki-young tire de ce récit classique une œuvre trouble et dérangeante. Il appuie sur le sadisme et la cruauté des situations, transforme son héroïne en figure démoniaque, érotique et perverse, et surtout refuse de se cantonner à un genre spécifique. Le film navigue ainsi d’un style à un autre, passant de la critique sociale à la satire, de l’humour noir au drame intimiste. La bande-son, détonnant mélange entre ritournelles sirupeuses et mélodies anxiogènes et grinçantes, joue également sur les frontières poreuses entre farce et horreur, drame et pantalonnade. Une œuvre et un propos qui résonnent fortement avec The Servant de Joseph Losey et Théorème de Pasolini, réalisés quelques années plus tard… respectivement en 1963 et 1968 !